vendredi 2 juin 2017

Toute une société se ruant sur le cul

Toute une société se ruant sur le cul. Cette phrase extrait de Nana montre l'importance du sexe dans la société que décrit Zola : celle du III empire et de la moralité publique. Nana est un ferment de destruction, mais cela sans le vouloir, par son sexe seul et par sa puissante odeur de femme, détruisant tout ce qu’elle approcheLe cul dans toute sa puissance le cul sur un autel et tous les sacrifiants devant. Il faut que le livre soit le poème du cul et la moralité sera le cul faisant tout tourner.

Nana marquise des hauts trottoirs, chair de marbre, son sexe assez fort pour détruire tout ce monde et n’en être pas entamé (on retrouve ici Esther de Balzac dans Grandeur et misère des courtisanes)

L'autre grand roman sexuel de Zola c'est la curée et Renée vêtue d'un maillot couleur tendre, qui lui montait des pieds jusqu’aux seins, en lui laissant les épaules te les bras nus; et, sur ce maillot, une simple blouse de mousseline, courte et garnie de deux volants, pour cacher un peu les hanches. Dans les cheveux, une couronne de fleurs des champs; aux chevilles et des poignets des cercles d’or. Et rien autre. Elle était nue.

Mais Zola dans sa soif de dire la vérité toute la vérité quand il s'agit de l'acte sexuel doit arrêter le récit : Dans nos histoires d’amour, quand nous arrivons au dénouement final, à l’acte sexuel, nous nous arrêtons, nous ne mettons qu’un mot ; eh bien ! tout dire, continuer à décrire et à analyser la jouissance, avec mes procédés de romancier réaliste et coloriste.

On  peut penser que le texte érotique l’intéresse en tant qu'exercice de style et c'est également un défi des cercles de l'époque. Zola en fréquentait 2 : le dîner des Cinq avec Flaubert et le groupe de Médan avec Maupassant et Huysmans. Dans ces dîners masculins les blagues et défis graveleux, lubriques sont habituels.

Et l'idée de se mesurer au Gamiani (1833) attribué à Musset ne doit pas être étranger a cette envie. Selon Huyssman Musset paria qu’en évitant toute expression crue ou érotique, il écrirait le volume le plus « Cela » que l’on pourrait rêver dans ce genre. Relever ce pari devait plaire à Zola.

En 1877, Maupassant réalisera la pièce  À la Feuille de rose où furent invités, outre Flaubert et Tourgueniev, Zola, Daudet et Goncourt.

Mais comme nous le voyons avec Nana et La curée; la société toute entière est un foutoir, c'est la vérité crue de ce foutoir que Zola veut dévoiler. Peut-être  qu'Alexandrine l'en a dissuadé.

Il n'eut pas besoin d'écrire ce texte  pour que tout au long de sa carrière, Zola soit taxé de pornographie par ses détracteurs qui entendaient sous cette accusation la représentation complaisante de détails infâmes en littérature, sans que ceux-là aient trait à la seule sexualité. Ainsi la critique de Louis Ulbach à propos de Thérèse Raquin qui dénonçait la « littérature putride » contemporaine, celle d’Albert Millaud à propos de L’Assommoir qui voyait dans le roman non pas du réalisme et de la crudité, mais de la malpropreté et de la pornographie, celle signée Ambroise Macrobe dans son glossaire La Flore pornographique.

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